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Avril 2015 : la rose II

La reine des fleurs II

mardi 31 mars 2015, par Léon

Un épanouissement fulgurant à partir du XVIIIe siècle

Continuons cette passionnante odyssée de la rose par la reproduction d’un texte, paru il y a quelque quatre-vingt cinq ans, et qui fait le point sur les connaissances du sujet à l’époque.

« Au 18e siècle pratiquement tous les chroniqueurs traitent de la rose. Un signe que la culture de la plante rencontre de plus en plus d’intérêt et que certaines obtentions apparaissent. Au début du 19e siècle l’essor est remarquable, notamment par l’engouement pour la reine des fleurs que l’impératrice Joséphine de Beauharnais (1763 - 1814) lui témoigne. Celle-ci lui voue une telle admiration qu’elle fait cultiver dans ses jardins de Malmaison tous les rosiers connus, allant jusqu’à envoyer dans tous les pays d’Europe des collectionneurs chargés de lui procurer les variétés qui lui font encore défaut. Cet impérial patronage rend la rose si populaire que de nombreux jardins sont créés afin de satisfaire à la demande. »

« Parmi les pionniers de la culture du rosier de l’époque citons en premier lieu Jean-Pierre Vibert (1777-1866) qui mérite une citation particulière pour la création de nombreuses nouveautés remarquables dont certaines retiennent encore aujourd’hui l’attention. Il améliora surtout les espèces centifolia et damascena. La rose ’Yolande d’Aragon’, commercialisée en 1843, est probablement son chef d’œuvre, considérée par de nombreux amateurs comme le nec plus ultra de la rose ancienne, au coloris et au parfum exceptionnels. »

« Pendant de longues années d’autres rosiéristes français connurent la réussite dans l’obtention de nouvelles roses admirables, et si la plupart des belles roses croissaient en France, des obtenteurs anglais faisaient preuve de grandes connaissances et engrangèrent également de beaux succès.
Au cours des années 1860 à 1865 apparaissaient dans les jardins français nombre d’éminentes nouveautés qui restent encore aujourd’hui performantes. Parmi elles citons ‘Fisher Holmes’, ‘Duc de Wellington’, ‘Charles Lefèvre’, ‘La Boule d’Or’, et la remarquable ‘Maréchal Niel’. Puis des rosiéristes anglais se mettent en concurrence avec les obtenteurs français, et jusqu’à ce jour ils sont allés de succès en succès. Egalement en Allemagne apparaissent au cours des dernières décennies des rosiers qui ont su se faire connaître au-delà des frontières du pays. »

« Lorsque l’on jette un regard sur les années au cours desquelles la rose porte le nom mérité de reine des fleurs, il est intéressant de constater que le nombre croissant de sortes est en rapport avec sa popularité. Du temps de Pline le Jeune, autour de 100 après J.-C., seulement douze variétés étaient connues. Autour de 1629 le nombre avait doublé. Dans le « English Herbal » de William Salmon (1710) trente-deux rosiers sont décrits, alors que dans les travaux de 1735 il est question de quarante-six variétés. Après le regain de l’intérêt porté à la culture des roses au début du siècle écoulé, leur nombre dépassait le millier. Un catalogue de l’année 1829 fait état de 2562 noms, et dix ans plus tard leur nombre atteignait les 5000. Vers 1925 on parle de plus de 12000 sortes, et chaque année s’en rajoutent de nouveaux. L’objectif de tout obtenteur est l’amélioration de l’existant, car enfoui dans le coeur de chacun sommeille l’ambition de créer la fleur parfaite qui lui assurera l’éternité. »

— Après avoir retracé brièvement l’histoire de la rose en tant que préférée des jardiniers, voyons comment ces milliers de fleurs ont vu le jour pour apporter à nos jardins cette diversité en couleur et en parfum. Pour ce faire, il est important de se pencher sérieusement sur les rosiers sauvages.

Le rosier est originaire de l’hémisphère nord où on le retrouve pratiquement partout, sauf dans les zones tropicales, parfois présent uniquement dans les hautes altitudes. On estime que le genre Rosa contient jusqu’à 250 espèces (actuellement on n’en retient plus que 100 à 150 espèces). Cet important nombre démontre la surprenante variabilité des plantes, alors que leur vaste dissémination prouve leur capacité d’adaptation aux différents terrains et aux conditions climatiques. C’est surtout par cette qualité que la rose se montre si disponible vis-à-vis des jardiniers à l’amélioration de sa forme et à la multiplication de ses variétés. Les obtenteurs ont profité de cette tendance naturelle des rosiers sauvages à changer leurs caractéristiques, alors que leur souplesse à se plier à toutes les conditions en ont fait de parfaits spécimens aptes à la recherche de la perfection.

Les rosiers sauvages sont des arbustes, sous-arbrisseaux, parfois arbrisseaux, érigés ou grimpants. Leurs tiges portent généralement des aiguillons et sont souvent pourvues de poils glanduleux, surtout aux rameaux à fleurs. Cela est nettement visible sur le rosier églantier (Rosa rubiginosa) et plus encore sur le rosier mousseux (Rosa x centifolia ‘Muscosa’). Ces poils gluants servent à une double action : premièrement à empêcher les bestioles indésirables de grimper jusqu’à la fleur ou le fruit, ensuite à diffuser un parfum afin d’attirer les insectes volants sur les fleurs. Les roses ne produisent pas de miel, mais l’abondance de pollen, les pétales clairement perceptibles et l’agréable senteur suffisent à attirer les visiteurs. La pollinisation intervient normalement par les insectes, mais comme les stigmates et les étamines arrivent à maturité en même temps, la génération spontanée n’est pas impossible.

La plupart des rosiers de jardin sont le résultat d’un croisement, ce qui signifie une pollinisation croisée entre espèces et/ou variétés différentes. En d’autres termes, lors de la création d’une nouvelle forme, l’obtenteur reprend à son compte le travail des insectes et sert de médiateur, tout en veillant à orienter le résultat en fonction de ses attentes.

Dès qu’une rose, qui doit être croisée avec une autre, s’est correctement développée et avant qu’elle ne s’ouvre, commence un minutieux travail de fécondation. La fleur est ensachée afin d’éviter toute intrusion non désirée jusqu’au moment où les stigmates flétrissent et les pétales tombent. A partir de là on la remet à l’air libre et au soleil afin qu’elle mûrisse ses graines. L’églantine, appelée aussi cynorhodon, est coupée au stade de maturité, parfois même avant, et disposée dans du sable humide jusqu’au moment où les graines peuvent être semées.

Ainsi l’obtention de nouveaux cultivars ne semble pas poser de grosses difficultés, et si l’on était sûr que chaque croisement débouche sur une rose de bonne facture, ce serait le cas. Malheureusement, les milliers de graines ainsi difficilement obtenues ne produisent souvent aucune forme exploitable. Le futur obtenteur d’une nouveauté valable doit s’attendre à de nombreuses déconvenues et faire preuve d’une patience à toute épreuve.

- Le sujet rose est si vaste, il y a tant à dire ; nous verrons le mois prochain d’un peu plus près différentes espèces sauvages, leurs caractéristiques et certaines obtentions qui en sont issues, et qui alimentent la fabuleuse saga de la reine des fleurs.

Léon

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