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Mai 2013 : le thrips de Californie

mardi 30 avril 2013, par Jean-Marc

Fin 2012 nous avions vu dans cette rubrique comment le virus de la maladie bronzée de la tomate avait sévi dans les potagers de la région et comment ce virus pourtant de souche animale avait muté en phytovirus en s’attachant pour sa propagation les services d’un insecte appartenant à la famille des thrips.

A l’heure où nous allons replanter nos belles solanées et où pour l’insecte un nouveau cycle de reproduction annuel va commencer il m’a paru intéressant de faire plus en détail un tour d’horizon des moyens dont nous disposons pour essayer d’enrayer sa prolifération.
Pour bien combattre notre thrips de Californie ou « Frankliniélla Occidentalis » il faut avant tout bien connaître son potentiel de reproduction, qui est élevé.
Pour une larve qui sortira de terre début juin, c’est, si la saison n’est pas anormalement pluvieuse, environ 600 individus qui seront comptabilisés à la fin août par les pontes des six générations successives, chaque génération ayant une durée de vie de 4 à 5 semaines mais imprimant la marque de son existence par des piqûres dans les feuilles des tomates et autant de fois le risque que si une des larves a contracté le virus, sur un pied malade ou toute autre plante virolée, elle le communique à tout le reste du jardin.

Dans la nombreuse famille des thrips, on y compte plus de 3000 espèces, notre Frankliniella est un peu l’enfant terrible de la bande. En effet tous les thrips ne sont pas forcément des ravageurs et certaines espèces jouent même le rôle de pollinisateur au même titre que les abeilles. Certains thrips sont aussi très casaniers et ne veulent pas quitter leur pays d’origine en dépit des nombreuses occasions qu’ils ont de le faire. A l’inverse le thrips de Californie est un grand voyageur qui n’hésite pas à faire ses valises pour aller visiter toutes les parties du monde. Il est de plus polyphage et s’attaque à toutes les solanacées, les haricots, salades, cyclamen, œillets, etc.

Parce qu’il s’ est implanté depuis seulement 30 ans en Europe il est peu connu du grand public et manque encore d’étude scientifique complète. Autant les autres insectes ravageurs (pucerons, punaises, aleurodes) sont peu mobiles, très localisables et commodes à éradiquer, autant le thrips est discret, de sa vie de larve à celle d’adulte, agile, se camouflant à la vue en glissant sous le revers des feuilles, ne laissant que quelques points noirs comme traces de son passage et surtout volage avec ses deux paires d’ailes. Chez cette espèce la reproduction est parthénogénique (les femelles peuvent se reproduire sans l’aide du mâle, du moins quelques temps) et elles sont en nombre plus élevé que les mâles dans la proportion de 10 pour 1.

L’ordre auquel appartient notre thrips est celui des Thysanoptère ce qui signifie en grec « à ailes frangées » et Linné lui-même avait déjà en 1758 identifié le genre. Autant dire que les thrips ne sont pas arrivés sur terre hier et qu’ils ont forcément des prédateurs naturels sinon avec une telle capacité reproductive ils auraient, depuis le temps, envahis toute la Terre. Mais ces prédateurs naturels ne sont pas forcément là où on souhaiterait les voir à l’œuvre comme l’on voit régulièrement les coccinelles venir réguler les pullulations de pucerons après une invasion.

La culture industrielle biologique sous serre, où la tomate représente une superficie conséquente et où les produits chimiques sont interdits, utilise ces auxiliaires pour décimer les rangs de thrips.
Mais il ne suffit pas d’ouvrir la porte de la serre pour que les prédateurs arrivent et ces bestioles sont élevées spécifiquement pour être lâchées à l’intérieur. Dans le camp des prédateurs on trouve la punaise Orius très efficace sur les larves et les adultes qu’elle arrive à consommer.
On trouve aussi des acariens prédateurs qui chassent les larves de thrips mais en raison de leur petite taille sont moins efficaces sur les tomates à cause des nombreux poils de la plante. On trouve aussi un autre thrips prédateur celui-là Franklinothrips vespiformis, insecte de 2 mm de long ressemblant à une fourmi ailée à l’appétit gargantuesque.
Tous ces insectes auxiliaires ne sont lâchés qu’au bon moment dans un espace clos et confiné et sont une des solutions pour combattre les thrips en culture industrielle.

Mais compte tenu de son prix (une boite de 50 vespiformis coûte environ 20 € et il faut lâcher 5 insectes au m2) il est évident qu’elle est peu adaptée au jardin d’amateur où nos prédateurs risqueraient d’aller nettoyer les thrips du jardin du voisin. Nous aurons encore le temps le mois prochain, avant l’invasion estivale, de passer en revue les autres moyens de luttes, chimiques et naturels.

Jean-Marc

Différentes sortes de thrips larve et adultes :

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