Avec ses petits matins empreints de rosée, fidèles témoins de la fraîcheur nocturne retrouvée, septembre est bien le mois roi au jardin d’amateur. Les cultures de tomates, d’aubergines et de poivrons sont à l’apogée de leur production et celles de poireaux, potirons et choux, en pleine croissance, pleines de promesses.
Mais septembre est aussi le mois où le jardinier doit penser à prolonger cette exubérance en semant la mâche qu’il récoltera à la fin de l’automne.
Curieusement si chaque français consomme annuellement, en moyenne, 4,5 kg de laitue, 2 kg de chicorée, il ne consomme que 150 g de mâche. Pourtant cette salade contient trois fois plus de vitamine C que la laitue. Associée à l’Oignon Doux des Cévennes, cela devient un condensé de vertus anti-oxydantes. Riche en fibres, elle améliore le transit intestinal et se révèle être un excellent coupe-faim. Surtout plus de la moitié de ses matières grasses sont des acides aminés de type Oméga 3 qui permettent de lutter contre les problèmes cardio-vasculaires et qui l’ont fait baptiser la salade anti-stress.
Dans sa région d’origine et de production actuelle, le Pays Nantais, qui commercialise à lui seul 85% des 20 000 tonnes produites en France, la culture industrielle de la mâche est une des plus mécanisée qui soit et obéit à des critères de production encore plus strict qu’une AOC.
Ainsi celle que l’on trouve en sachet fraîcheur ou en barquette a été semée en plates bandes d’environ 2 mètres de large, sous de grandes serres, avec une densité élevée et millimétrée et sur un lit de sable grossier provenant exclusivement de l’estuaire de la Loire.
Arrivée à maturité, la parcelle est littéralement fauchée par une machine qui, glissant sur le sable, ne ramasse ainsi ni terre ni radicelles. Avant d’être ensachée, la récolte passera ensuite dans trois bains successifs d’eau dans lesquels sont injectées des bulles d’air chargées de faire bouger les feuilles pour pouvoir déloger, à leurs aisselles, les derniers grains de sable.
A l’opposé de cette méthodologie, dans nos jardins, le semis de mâche est peu exigeant sur la qualité du sol et, compte tenu de sa période de croissance, peu gourmand en eau. Il se contente très bien des restes d’une culture précédente dont on aura simplement griffé la surface pour pouvoir mieux l’aplanir au râteau.
En fait, presque tous les jardiniers peuvent tenter un semis s’ils satisfont à ces deux conditions :
la première est de maintenir le semis frais en l’arrosant tous les jours jusqu’à la levée qui a lieu 7 à 8 jours après,
la seconde ne pas s’appeler « Mr Tamalou » ou en clair pouvoir se baisser et se mettre à genoux pour procéder aux trois désherbages que réclament les semis de septembre. Les deux premiers désherbages étant vitaux pour ne pas perdre la culture par envahissement des mauvaises herbes.
Les jardiniers amateurs commettent souvent l’erreur de semer trop dru ou trop profond. Trop profond (plus de 2 cm), la mâche ne lève pas car cette salade a surtout la capacité de germer à même le sol. Trop dru, le semis s’étiolera et il sera là aussi perdu. La norme à absolument respecter est de 1 g de graines au mètre carré.
Comme un sachet pèse entre 3 et 4 g, il suffit de sortir, sur un endroit plat, toutes les graines du sachet, d’en faire suivant le cas trois ou quatre tas identiques et de semer tas après tas sur les planches prévues pour le semis que l’on aura auparavant délimité en carré d’un mètre.
La répartition des graines sur un espace limité et quadrillé est donc plus facile et parfaite qu’à la volée et leur régularité encore plus grande si l’on prend soin de les lâcher, en imprimant à la paume de la main, tenue assez haut sur le carré, de petits mouvements vibratoires.
Une fois toute la planche semée, il convient de passer le râteau pour recouvrir légèrement les graines de terre (1 cm maximum) et plomber ensuite son semis avec le râteau tenu à la verticale.
La mâche (surtout à grosses graines) n’a qu’un ennemi. Il n’est pas bien gros mais il agit en bande, de surcroît bien organisée. La nuit qui suit le semis est cruciale car une simple fourmilière peut, pendant que vous dormez en rêvant à votre future récolte, vous embarquer les ¾ de votre travail. Cette nuit-là, toutes les fourmis sont sur la brèche : il y a celles qui repèrent à l’odeur la graine enterrée, elles font alors appel à une plus grosse qui va se mettre à forer accompagnée de quatre, plus petites, chargées d’évacuer vers l’arrière la terre remuée. Une fois la graine trouvée, c’est une porteuse qui prend le relais jusqu’à l’entrée de la fourmilière où d’autres vont s’en emparer pour la stocker, l’ensemble de ces opérations se déroulant en à peine 5 minutes.
Bref, quelques jours avant votre semis, il vaut mieux s’assurer qu’il n’y a pas une fourmilière dans le secteur et le meilleur moyen de le vérifier est d’écraser quelques morceaux de pain sec aux angles du jardin, un jour de grand soleil. Vous ne tarderez pas à localiser l’emplacement des voleuses et à agir en conséquence.
On sème en premier chez nous, de fin août au 20 septembre, la mâche à grosse graine, la plus précoce et productive de toutes les variétés mais qui nécessite un peu plus d’eau et trois désherbages.
On sème ensuite, jusqu’au 15 octobre maximum, les variétés à petites graines (Ronde Maraîchère, Verte de Cambrai, Coquille de Louviers, Vit) très résistantes au froid qui arriveront à maturité de mi-janvier à fin février et qui en raison de la date de leur semis sont à la fois moins envahies par les mauvaises herbes et par les fourmis.
Jean-Marc