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Jardin du midi accueillant pour la faune

lundi 28 novembre 2011, par Marie-Claude

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Revues de jardinage et livres naturalistes regorgent d’indications de végétaux attractifs pour les oiseaux et pour la petite faune dans les jardins. Ces réflexions sont intéressantes mais souvent tirées de documents anglais ou concernant la moitié nord de la France. Or, ces végétaux recommandés sont rarement adaptés à un climat méditerranéen, caractérisé par des étés chauds et secs. Ainsi, le sorbier des oiseaux, Sorbus aucuparia n’est à l’aise dans le Gard que dans les zones fraîches des Cévennes vers l’Aigoual.

Il existe pourtant de nombreux arbres ou arbustes résistants à la sécheresse et produisant des fruits ou des baies appréciés par les oiseaux. Par ailleurs, c’est dans l’intérêt du jardinier d’organiser son jardin avec des floraisons échelonnées au fil des saisons, ce qui assurera une meilleure pollinisation par les insectes. Oiseaux, insectes, petits mammifères, lézards et rainettes amènent de la vie dans un jardin. Cette vie contribue à en améliorer l’équilibre naturel, certaines espèces en consomment d’autres et constituent d’utiles auxiliaires du jardinier. Un couple de mésanges consomme plusieurs dizaines de chenilles par jour en période de nourrissage de leurs jeunes !

Voici quelques suggestions de végétaux attractifs pour la faune. Dans le midi, il faut bien sûr de l’ombre ; un des arbres les plus emblématiques est le micocoulier Celtis australis. Caduque, il laisse passer le soleil en hiver. Certains lui reprochent de beaucoup se ressemer, c’est vrai ! Une partie des fruits tombe à la chute des feuilles et il faut balayer. Mais les « belicocas » (un des noms occitan du fruit) sont comestibles et les oiseaux apprécient. Ils vont s’en nourrir sur une longue période. Dès leur maturité en septembre-octobre, fauvette à tête noire et fauvette mélanocéphale se régalent des fruits, sans compter les merles puis les grives un peu plus tard. Durant tout l’hiver jusqu’en février, le micocoulier accueille le verdier, le gros-bec casse-noyaux, qui viennent se nourrir des graines…

Une pergola près de la maison ? Une vigne ou une vigne-vierge ont beaucoup d’intérêts ; leur ombrage est léger et très agréable ; ces lianes sont rustiques et supportent bien la taille ; au printemps la floraison est abondante et bruissante d’insectes butineurs ; en été, fauvettes et mésanges s’y relaient à la recherche d’insectes et d’araignées ; à l’automne, c’est un ballet très actif de moineaux, rouges-queues, tourterelles et étourneaux qui viennent en consommer les fruits. Certes, ceux-ci peuvent tomber et salir, mais avec beaucoup d’oiseaux il y en a peu qui atteignent le sol et c’est un si joli spectacle !

Les arbustes amènent de la structure au jardin, en haies ou pour créer des îlots ; les oiseaux peuvent y nicher ; souvent les espèces du midi sont à feuilles persistantes. En premier lieu je citerai le laurier–tin Viburnum tinus. Ce n’est pas le plus résistant à la sècheresse car en l’absence d’orage en août il manifeste des signes de soif. Cependant, il est irremplaçable pour sa floraison précoce et parfumée s’étalant de janvier à mars, parfois elle débute plus tôt. Les oiseaux se régalent de ses fruits à l’automne. C’est grâce à cet arbuste que je détecte chaque année l’arrivée de la grive musicienne, courant octobre. Le nerprun alaterne Rhamnus alaternus a un joli feuillage luisant ; la chenille du citron de Provence s’y développe. Les oiseaux consomment aussi ses fruits.

L’arbousier, Arbutus unedo est un petit arbre dont le feuillage persistant est remarquable ; coriace et vernissé, il reste beau en été. Sa floraison et sa fructification automnale rutilante (issue des fleurs de l’année précédente) sont spectaculaires. Les clochettes blanches offrent une dernière occasion aux abeilles de butiner avant l’hiver, les arbouses sont comestibles pour nous et très appréciées des grives et merles. Par ailleurs, les chenilles du jason et de la thécla de l’arbousier se nourrissent exclusivement de ses feuilles. Spontané en sol acide ou neutre, l’arbousier peut également pousser sur sol calcaire s’il est très drainé.

Les filaires, Phillyrea angustifolia, P. intermedia et P. latifolia sont d’autres arbustes du midi au feuillage vernissé, bien dense et toujours impeccable ; les fauvettes en particulier adorent leurs baies. Un autre arbuste dont les fauvettes apprécient les fruits : le chalef, Eleagnus x ebbingei. En général il est utilisé dans les haies taillées au carré alors qu’il est très beau en port naturel ; la longue floraison a lieu à l’automne ; les fleurs sont visuellement discrètes mais délicieusement parfumées. Le buis, Buxus sempervirens est bien connu mais on ne prête pas toujours attention à sa floraison en avril, précieuse par exemple pour les coccinelles qui y trouvent une ressource alimentaire abondante à la sortie de leur hibernation. L’oranger du Mexique, Choysia ternata, a un feuillage vert brillant aromatique. Ses jolies fleurs blanches parfumées attirent les papillons. Il fleurit en mars-avril puis à l’automne. Le buplèvre arbustif, Bupleurum fruticosum, est un bel arbrisseau indigène au feuillage vert bleuté qui fleurit en plein été. Ses ombelles jaune-vert sont fréquentées par de nombreux insectes. On pourra l’associer à la sauge d’Afghanistan, Perovskia atriplicifolia , arbrisseau à fleurs bleues qui fleurit en même temps. La floraison blanche de l’abelia , Abelia x grandiflora, débute en été et attire des papillons, elle s’ampliflie à l’automne et les hyménoptères y butinent jusqu’en novembre.

Au printemps, les floraisons sont nombreuses au jardin avec les cistes, les phlomis, les sauges, etc. Plus tôt, en février-mars ce sont les romarins et les euphorbes qui apportent de la couleur et du nectar aux insectes. En été, les floraisons diminuent, chez nous celle des lavandes est généralement terminée au 15 juillet. Quelques plantes aromatiques prennent le relais. Elles sont de taille modeste mais leur floraison est bienvenue, c’est l’occasion d’observer de petits papillons. Ce sont, l’hysope aux hampes bleues, des sarriettes parmi lesquelles Satureja montana (fl. Blanches), Satureja spicata ( fl. blanches) et Satureja montana ssp.illyrica (fl. bleues), des origans dont Origanum laevigatum (fl. rose violacé) et Origanum dictamnus (fl. roses à bractées vertes… A partir de la fin août, les grands orpins (Sedum spectabile, Sedum maximum, Sedum telephium) annoncent le regain des floraisons lié à la baisse des températures et au retour des pluies. C’est le cas des valérianes, des sauges, etc. Il est intéressant de garder des plantes spontanées dans son jardin : soit intégrées à des massifs, soit dans une partie qui sera plus sauvage ; la floraison des graminées méditerranéennes, de la vipérine, Echium vulgare, du fenouil, Foeniculum vulgare,… sont très agréables et ces plantes fournissent abri et nourriture à de nombreux insectes. Par exemple, la lunetière Biscutella laevigata est une Brassicacée qui nourrit la chenille de l’aurore de Provence ou du marbré des biscutelles.

Souvent le jardinier bataille contre les ronces, les clématites ou la salsepareille et il n’aime pas voir le lierre monter trop haut dans les arbres. Pourtant ces végétaux ont aussi leur place dans le jardin car ils sont précieux pour la faune. L’avantage de ces végétaux, c’est de pouvoir grimper dans des endroits inaccessibles et souvent incultes. Les oiseaux et les araignées s’y abritent, de nombreux insectes se nourrissent de leur feuillage ou de leurs fleurs. La floraison du lierre à l’arrière saison fournit un nectar très recherché par les insectes butineurs. Au printemps, les baies du lierre constituent un mets de choix pour les oiseaux.

N’oubliez pas de respecter les cycles biologiques, évitez de tailler les haies en période de nidification des oiseaux (de mars à juin) ou de floraison. En toutes saisons, les oiseaux ont besoin de boire et de se baigner. Un petit abreuvoir peu profond et à pentes douces sera bienvenu. Vous pourrez l’installer à proximité de vos fenêtres : le spectacle est alors garanti à certaines heures de la journée.
Des pucerons sur les rosiers ? chouette, vous allez pouvoir observer le travail des insectes auxiliaires ! Il faudra un peu de temps pour que syrphes, chrysopes, coccinelles viennent pondre dans la colonie de pucerons. De l’attention et peut-être même une loupe seront utiles pour détecter les larves et occasionnellement observer la transformation en pupe puis insecte.
Peu à peu la colonie diminuera. Comme pour les pucerons, la régulation peut se faire dans le jardin par les insectes, les oiseaux, les mammifères (hérissons, chauves-souris). Avec des floraisons variées et échelonnées dans le temps, une faune diversifiée, l’équilibre s’installe au fil du temps.
Si toutefois les limaces posent problème, vous pouvez utiliser un produit à base de phosphate de fer ce qui est inoffensif pour les hérissons qui consomment des limaces. Pour le hérisson, une coupelle remplie d’eau sera recherchée en été.

Evitez d’utiliser des pesticides du genre herbicides Un peu d’entretien manuel ou mécanique sera toujours préférable à l’emploi de produits chimiques, c’est aussi plus efficace à long terme car cela ne perturbe pas les équilibres biologiques.

- Quelques conseils pour une bonne réussite de vos plantations :

Planter des végétaux de petite taille (jeunes) qui reprendront mieux, de préférence à l’automne dès les premières pluies de septembre-octobre. Il faut d’abord préparer le sol en enlevant les racines rencontrées et ameublir en profondeur. A la plantation, il faut créer une cuvette autour du plant pour faciliter l’arrosage, celui-ci doit être copieux mais espacé dans le temps. Ainsi, les racines fileront en profondeur, ce qui est un gage de réussite de la plantation. Certaines plantes apprécieront un apport de compost en surface. Enfin, un paillage (minéral ou organique, au choix) évitera la repousse de plantes indésirables. Cela favorisera aussi un retour rapide de la vie dans le sol, tout en maintenant une fraîcheur utile à la plante. Cette méthode assurera une bonne reprise des végétaux qui n’auront plus besoin d’arrosage une ou deux années après la plantation.

Autres arbustes attractifs pour la faune pouvant être plantés dans les jardins : aubépines (dont azérolier), fusain d’Europe, troëne, luzerne arborescente (Medicago arborea), myrthes, oliviers, pistachiers, certains rosiers proches des botaniques, buddléjas sauf B. davidii, cognassier du japon, grenadier, lilas,...

Lectures :
Pour un jardin sans arrosage, d’Olivier Filippi
Jardin de fleurs, jardin bio, de Brigitte Lapouge-Déjean
Compost et paillage au jardin, de Denis Pépin
Revue Les quatre saisons du jardin bio


Notes

[1*Article écrit initialement pour La gazette du monticole, revue de l’association Gard nature

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